Accéder au contenu principal

La guerre dans le Missouri


Le Missouri est un Etat producteur de coton comptant un nombre important d’esclaves. Lorsque l’Etat demande à entrer dans l'Union, il se heurte à l'opposition des États du Nord, partisans de l'abolition de l'esclavage. Ces derniers refusent de voir rompre en leur défaveur l'équilibre entre États libres et États esclavagistes. Son admission est finalement acceptée grâce au Compromis du Missouri de 1820. L’Etat intègre l'Union en tant qu’État esclavagiste le 10 août 1821, mais ne peut introduire sur son territoire de nouveaux esclaves.
Avant la guerre, l’Etat connait des affrontements entre pro et anti-esclavagistes. Le gouverneur Claiborne Jackson est un démocrate esclavagiste modéré. Il adopte une position de neutralité tout en restant dans l’Union. Néanmoins, il estime que si l'Union menace l'esclavage dans le Missouri, l'Etat devra faire sécession.

Après la prise du fort Sumter, Jackson rejette la demande de Lincoln de lever des troupes pour l’armée fédérale. Des milices sécessionnistes prennent le contrôle de l’arsenal de Kansas City le 20 avril 1861. Le capitaine Nathaniel Lyon dirige l’arsenal de Saint Louis. Unioniste convaincu, il craint une nouvelle attaque des milices sécessionnistes. Il décide de faire transférer les fusils dans l’Illinois. Le 25 avril, Lyon dupe la foule en envoyant quelques caisses de vieux fusils sur un vapeur bien visible, tandis que le reste des armes s’éloignent par un autre navire. Le 10 mai, Lyon met hors d’état de nuire la milice sécessionniste stationnée à Camp Jackson. Des émeutes éclatent lorsque ses troupes traversent la ville avec les prisonniers.
Le 11 juin 1861, le général William Harney négocie un accord avec le chef des armées du Missouri Sterling Price et le gouverneur Jackson. Ces derniers s’engagent à démobiliser les milices sécessionnistes et interdire l’entrée de l’armée confédérée au Missouri. En échange, l’Union s’engage à ne pas envoyer de troupes fédérales dans l’Etat. Nathaniel Lyon et le sénateur Francis Blair Jr comprennent que cet accord revient à reconnaitre la neutralité du Missouri et risque à terme d’aboutir à la sécession. Avec l’accord de Lincoln, Lyon démet Price du commandement militaire et lui succède. Il reçoit à ce titre le grade de général. Lyon exige la liberté de mouvement des troupes fédérales dans l’Etat, ce que le gouverneur Clairbone Jackson refuse. Pour marquer sa désapprobation, il demande le soutien de l’armée confédérée. L’arrivée des rebelles sème la panique. Des milices abolitionnistes arrivent du Kansas. Lyon réunit une convention qui démet Jackson de ses fonctions, déclare le pouvoir vacant et déplace la capitale à Saint Louis. Lyon et Price mettent sur pied des contingents militaires.
Le 22 juillet, Francis Blair Jr constitue un gouvernement provisoire et déclare la vacance de tous les postes de la fonction publique et de la législature du Missouri. Des élections élisent un nouveau gouverneur et une nouvelle assemblée. De son côté le 3 novembre 1861, Jackson réunit à Naosho la législature pro-sudiste qui ratifie une ordonnance de sécession. Le Congrès confédéré accepte le Missouri au sein des Etats Confédérés d’Amérique. L’administration Jackson s’exile en Arkansas.

Le 10 août 1861, les deux armées se font face à Wilson’s Creek près de Springfield. Le terrain est accidenté. Il présente des collines avec de profondes ravines et la rivière encaissée. Le Nord aligne 6.200 hommes et le Sud 10.175. Seulement, les sécessionnistes possèdent un équipement de médiocre qualité. Lyon souhaite prendre les Confédérés en tenaille. De son côté, Price souhaite contourner les Fédérés.
Le colonel Franz Sigel, sous les ordres de Lyon, lance l’attaque au Nord, tandis qu’au Sud, Lyon affronte la cavalerie sudiste jusqu’à une colline, qui recevra après la bataille le surnom de colline sanglante. Au sommet, l’artillerie sudiste repousse les troupes de Lyon. Price peut réorganiser ses lignes de défense. Il y a urgence, car les troupes de Sigel se rapprochent de la colline. Pendant ce temps, Lyon ordonne au capitaine Joseph Plummer d’attaquer la batterie d’artillerie par le flanc. Les troupes sudistes de Benjamin McCulloch arrivent en renfort et repoussent les Nordistes. De son côté, Sigel confond les Confédérés avec des régiments alliés, car ils portent tous des vêtements grisés. Les soldats paniquent et s’enfuient. Lyon reste seul avec son régiment. Il meurt d’une balle dans la poitrine. Price consolide ses lignes et s’apprête à relancer l’assaut. Toutefois, la fumée des combats et des canons empêchent une contre-attaque efficace, laissant le temps aux Nordistes de se regrouper dans la ville de Springfield.
La bataille de Wilson’s Creek cause la mort de 223 nordistes et de 265 sudistes, auxquels s’ajoutent plus de 1500 blessés des deux bords. Sur le plan militaire, le Sud remporte la victoire, car Price est parvenu à conserver le terrain et à repousser l’ennemi. Néanmoins, cette victoire n’est pas assez franche pour faire pencher le Missouri du côté de la Confédération.

Le Missouri reste dans l’Union et la grande majorité des Missouriens s’engagent chez les Nordistes. Néanmoins, Richmond revendique cet Etat, puisqu’il existe un gouverneur du Missouri rattaché à la Confédération. Cette ambigüité se traduit sur le terrain par la présence de bandes de francs-tireurs. Ces hommes armés n’appartiennent à aucune armée officielle et ne respectent pas la distinction entre civils et militaires. Ils lancent des raids meurtriers sur les villes, tendant des embuscades sur les routes, incendiant les fermes, etc. Parmi ces derniers, nous pouvons citer des noms célèbres tels que Jesse et Frank James, Jim Younger et William Quantrill. Les francs-tireurs pro-sudistes demeurent plusieurs dizaines d’années après la victoire du Nord en 1865 devenant des criminels et non plus des rebelles.

Sources
Texte :
- KEEGAN John, La Guerre de Sécession, Perrin, Paris, 2013
- DOOMS Logan, Les opérations de prise de contrôle des Etats frontaliers : le Missouri, publié le 19 novembre 2012, https://laguerredesecession.wordpress.com
Image : La bataille de Wilson’s Creek par Kurz and Allison, wikipédia.

Commentaires

Les articles les plus consultés

Lilith, la première femme de la Bible et d'Adam

Avez-vous d é j à lu la Bible? En entier? Peu l'ont fait! Au moins la Gen è se alors! La Gen è se? Mais si, le d é but, l'intro' ! Lorsque Dieu cr é e le ciel, la terre, les ê tres vivants et enfin l'homme Adam! Enfin, Adam et È ve... Vous connaissez cette histoire et souvent peu le reste. Lorsque je discute de la Bible avec des amis ou des é l è ves - pas toujours ignorants du fait religieux - je remarque souvent un ab î me d'ignorance de l'histoire biblique comme si on passait directement d'Adam à J é sus. Ah si: les gens connaissent aussi Abraham et Mo ï se. J'ai toujours aim é le d é but des histoires. La Bible ne fait pas exception. Je ne sais pas combien de fois j'ai pu lire et relire la Gen è se. Et puis un jour, un passage m'a turlupin é . Le sixi è me jour, Dieu d é cida de remplir la terre d'animaux, d'oiseaux et de bestioles. Puis, il est é crit: Chapitre 1: 26 Dieu dit : « Faisons l ’ homme à notre image, se

Alexandre le Grand homosexuel ? Le doute Hephaestion

Il est un fait, sur la possible homosexualité d’Alexandre, qu’il faut relever immédiatement. De toute sa vie, aucun acteur privilégié, c’est à dire proche du conquérant – et ils sont nombreux -  n’a jamais affirmé ou constaté de visu le voir pratiquer une relation sexuelle avec un autre homme. Cependant aucun non plus n’affirme qu’il n’en a jamais eue. La seule énigme tourne autour du seul et même homme avec qui il partage très souvent son quotidien: H é phaestion. Savoir si ces deux hommes ont un jour ou l’autre sauté cette fragile frontière qui sépare la grande amitié de l’amour restera pour l’éternité en suspens… du moins pour le moment ! Il faut s’attarder un instant sur l’ami intime d’Alexandre, celui qui lui sera toujours fidèle. H é phaestion naît à Pella, la même année qu’Alexandre. Fils d'Amyntas, un aristocrate macédonien, il reçoit également la même éducation que lui auprès du philosophe Aristote dans son adolescence. Il est un homme fort et beau. Certaines anecdo

Cléopâtre, son tapis et Jules César : Une Histoire d'Amour Épique et Mystérieuse qui a Bouleversé l'Empire Romain

Les amours passionnées entre la célèbre reine égyptienne Cléopâtre et le tout-puissant et charismatique Jules César forment un épisode à la fois mystérieux et envoûtant de l'histoire. Leur relation est digne des ébats charnels des dieux de l'Olympe. Au sein de leur amour naît un enfant légendaire et secret, Césarion, conférant à la reine une place singulière dans l'histoire et une renommée qui fait jaser du sénat romain jusqu'aux recoins les plus sombres de l'empire. Cléopâtre, descendante de Ptolémée Ier, général et compagnon d'Alexandre le Grand, est d'origine grecque, mais elle se distingue par son amour pour son peuple et son désir ardent de faire reconnaître l'Égypte comme la grande civilisation du monde méditerranéen, au même titre que Rome. Polyglotte, elle parle la langue de son peuple, une particularité sans précédent parmi les descendants de la dynastie des Ptolémées, qui règnent sur le trône depuis trois siècles.

Pasteur et la découverte du vaccin contre la rage

En 1879, Louis Pasteur, surnommé par René Dubos le « Franc-tireur de la science », a découvert le principe du vaccin et ceci grâce aux vacances d’été que celui-ci s’est octroyé. Tout grand esprit a besoin de repos. Le choléra des poules fait alors rage, depuis le printemps. Après plusieurs mois d’expériences infructueuses, Pasteur décide de se reposer et part rejoindre sa femme ainsi que toute sa famille dans sa maison de campagne. De retour dans son laboratoire, très détendu après ses congés estivaux, il reprend avec une grande motivation ses recherches, suivant le même procédé que celui établi jusque-là. Il inocule la bactérie du choléra sur des poules. Et il attend : une heure, deux heures. Aucune poule ne meurt. L’aiguille de l’horloge tourne et tourne pendant des heures, tout comme Pasteur dans son laboratoire. Rien ne se passe. Les poules sont toujours aussi pimpantes. Le chimiste de formation, loin d’être novice en matière d’expériences scientifiques, réfléchit : « Mais que

Hitler et Mussolini : quand l’élève dépasse le maître

En 1922, Benito Mussolini à la tête du parti fasciste italien, marche sur Rome et s’empare du pouvoir. Il transforme la démocratie en Etat fasciste. De l’autre côté des Alpes, Adolf Hitler observe ses actions. Mussolini est un modèle à suivre. Hitler organise son parti sur le modèle italien. L’année suivante, il tente lui aussi de marcher sur Berlin, pour s’emparer du pouvoir. C’est un échec. Il doit attendre les élections de 1933, pour accéder à la fonction de chancelier. La première entrevue entre les deux dictateurs se déroule à Rome en 1934. Le principal sujet réside dans la question autrichienne. Mussolini protège l’Autriche, qu’il considère comme une zone tampon face à l’Allemagne. Le meurtre du chancelier Dollfuss le 25 juillet 1934 par des sympathisants nazis est très mal vu par Rome. Mussolini envoie des troupes à la frontière, empêchant ainsi les nazis de prendre le pouvoir. Le Duce impose de par sa prestance. Vêtu de son bel uniforme, il apparaît comme l’homme fort au côté d

Aux origines de la galette bretonne

Chandeleur oblige, les crêpes sont de la partie ; et en Bretagne, qui dit crêpe, dit galette. L’histoire de la galette est étroitement associée à celle du blé noir, son principal ingrédient. C’est le parcours historique de cette céréale que nous allons retracer ici. Suivons à présent pas à pas la recette. Afin de réussir une bonne galette bretonne, accompagnons les croisés en Asie, au XIIe siècle. Après plusieurs milliers de kilomètres parcourus, des champs de fleurs roses s’étendent à perte de vue. Ce n’est pas un mirage, ni de simples fleurs d’ornement : les croisés découvrent le blé noir. Ils en prennent quelques plants, puis regagnent l’Europe avec des mules chargées de la précieuse semence. Mais le retour au Vieux Continent rime avec désillusion pour ces « chevaliers agricoles ». La culture de ce blé est exigeante et sa production reste faible. Néanmoins un espoir renaît du côté des exploitations d’une des régions françaises. Cet endroit est connu pour sa pluie :

Alexandre le Grand et Diogène: une rencontre de géant

Vous connaissez mon amour inconditionnel pour Alexandre le Grand. Aussi, aujourd'hui je vais vous conter un des épisodes qui m'a toujours marqué dans la vie du Macédonien : sa rencontre avec le célèbre philosophe cynique Diogène. De son entrevue, je crois, Alexandre en a retenu une leçon de vie qu'il essaiera, avec plus ou moins de bonheur ou de réussite, de s'appliquer tout au long de sa courte vie : l'humilité. Nous sommes en 335 avant notre ère. Alexandre n'est pas encore Alexandre le Grand et il n'a pas encore vingt-un ans. Pourtant, il est déjà craint par les Grecs... Bientôt par les Perses. En attendant, le jeune roi macédonien vient d'épater tous ceux qui doutaient encore de lui. Voilà quelques mois, son père Philippe mourrait sous les coups de couteaux de Pausanias - amant blessé - et la Grèce soumise décide alors de se révolter sous l'égide du meneur Démosthène et de la cité d'Athènes. Alexandre, fou de rage devant tant de traîtrise,

Hypatie d'Alexandrie, une femme seule face aux chrétiens

Alexandrie, ville de savoir ; ville de délices ; ville de richesses ! Et pourtant parfois, ville décadente et théâtre des pires atrocités faisant ressortir le vice animal, dénué de toute philosophie civilisatrice. En 415 de notre ère, cette Alexandrie, cité révérée et donnée en exemple, va connaître les premiers signes de sa décadence : elle assassine une des plus grandes savantes et philosophes de l’histoire de l'humanité, la belle et intelligente Hypatie. Née vers 370, Hypatie a environ dix ans lorsque l’empereur Théodose proclame la foi chrétienne comme étant la religion officielle de l’empire. Théodose met fin à un millénaire de stabilité religieuse et installe une religion qui tend à la prédominance   et qui, par l’intolérance qu’elle exerce, met l’empire en proie à des révoltes incessantes.  Moins d’un siècle suffira à le faire définitivement chuter ! Les chrétiens avaient été plusieurs fois massacrés – souvent injustement – servant de boucs émissaires quand la situation l’i

Le destructeur du nez du sphinx

Voilà bien longtemps que les hommes de la riche et nourricière terre d’Egypte le contemple. On vient également de loin pour se recueillir devant lui. Le Sphinx, cet être gigantesque que les plus grands hommes révèreront comme un dieu est un porte bonheur ! Né de la volonté du pharaon Khéphren, ce mastodonte taillé dans la roche garde depuis 2500 av. notre ère environ le plateau de Guizèh et ses somptueuses tombes : les pyramides de Khéops, Khéphren et Mykérinos. Le Sphinx parcourt les siècles avec aisance bien qu’il faille régulièrement le déterrer car le sable, inlassablement, vient le recouvrir jusqu’aux épaules. La chrétienté puis l’islam passent et le culte du dieu lion à tête d’homme s’éteint progressivement sans toutefois totalement disparaître. Les musulmans d’Egypte le considèrent tel un génie et l’admirent comme une œuvre d’art défiant la nature et rendant grâce au génie humain voulu par Dieu. Malheureusement, les belles heures théologiques, bien souvent plus intellectuelles